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À la recherche de la vérité... |
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Article publié dans Le Chainon [SFOHG] Volume 27 Numéro 1 Hiver 2009 pp. 53-62 [La version anglaise de cet article a été publiée dans le Michigan's Habitant Heritage [FCHSM] Vol. 30 No 2 Spring 2009]
Préambule Linda Lauzon, Directrice Générale, Société franco-ontarienne d'histoire et de généalogie
L’aventure Catherine Pillard continue toujours d’occuper nos recherches.
Suite à la parution des premiers articles dans Le Chaînon[1] à l’automne 2007 et en 2008, Gail Moreau-DesHarnais, membre de la SFOHG La Pionnière du sud-ouest à Lakeshore, près de Windsor (Ontario) et également membre du French-Canadian Heritage Society of Michigan, s’est jointe à un groupe de discussion créé spécifiquement pour permettre aux généalogistes d'exprimer leur opinions quant à la validité des résultats de tests d'ADNmt en généalogie et, plus particulièrement, sur ceux des descendants de Catherine Pillard, qui ne font évidemment pas l'unanimité dans le monde généalogique. Au tout début, Gail faisait partie des généalogistes sceptiques quant aux origines réelles de Catherine Pillard. La vive controverse déclenchée par les interprétations divergentes des tests génétiques et les commentaires négatifs qui s’ensuivirent l’ont motivée à pousser à fond une recherche généalogique traditionnelle. Afin de vérifier l’exactitude des origines de Catherine, il lui fallait dénicher et éplucher tous les documents disponibles concernant cette dernière. Plus ses recherches avançaient, plus son scepticisme s’estompait. Elle est aujourd'hui tout à fait convaincue de la validité des résultats des tests génétiques des descendants de Catherine que nous avons eu l'occasion d'étudier jusqu'à présent. Quatre d’entre eux furent amplement expliqués dans les Chaînon précédents.
Il est parfois difficile de rester objectif après un travail aussi exhaustif, mais il a fallu résumer des centaines d’heures de recherche en un peu plus de 5 000 mots pour présenter aux lecteurs l'envers de la médaille, si l'on peut s'exprimer ainsi, afin de les convaincre d'y regarder de plus près, tout comme Gail Moreau-DesHarnais l'a fait.
Le but ultime de cet article est de permettre aux lecteurs d’entreprendre le même cheminement aboutissant à une conclusion crédible. Nous n’avons pas la prétention de détenir toutes les vérités. Nous espérons simplement réussir à convaincre les lecteurs, qu'en généalogie, il est nécessaire de garder un esprit ouvert face aux nouvelles méthodes scientifiques et aux nouveaux outils technologiques. Il ne faut pas craindre d’y regarder de plus près lorsque ces nouveaux moyens présentent des résultats contraires aux croyances populaires établies depuis les tous premiers balbutiements de la généalogie. Il y aura toujours une place pour le progrès et l’innovation. Il ne faut surtout pas avoir peur de la vérité et de la chercher là où elle se trouve, même si ça ne fait pas toujours l'unanimité... Dans le présent article, les auteures ont remis en question les conclusions tenues pour acquis jusqu’à ce jour par les historiens et les généalogistes au sujet des origines de Catherine Pillard. Elles sont arrivées à un dénouement surprenant qu’il nous fait plaisir de partager avec tous les lecteurs du Chaînon, convaincus ou non.
Qui est l’épouse de Pierre Charron…? Qui est la véritable « Catherine Pillard », épouse de Pierre Charron ? Quelles sont ses origines et qui sont ses parents ? Jusqu’à tout récemment, selon la croyance populaire, on présumait que Catherine Pillard, fille de Pierre Pillard et de Marguerite Moulinet, avait été baptisée le 30 mars 1646 à La Rochelle, en France et confirmée à Montréal en 1664 sous le nom de Catherine Plate; que cette même Catherine, future épouse de Pierre Charron, aurait aussi fait partie du contingent des Filles du roi arrivées au Canada en 1663. [2] Toutefois, des résultats de tests génétiques d’ADNmt, soit l’analyse de gènes transmis de mère en fille, fournissant une information génétique sur nos ancêtres éloignés, ont amené un questionnement dont les réponses ne nous permettent plus d’assumer, ni de considérer quoi que ce soit comme acquis. Les résultats ainsi obtenus par huit descendants de trois des filles de Catherine indiquent que la lignée maternelle de Catherine n’est pas d’origine européenne. Dans les circonstances, il était nécessaire d’y regarder de plus près. Après une analyse approfondie de la documentation disponible dans les registres de France et de la Nouvelle-France concernant la famille de Catherine Pillard, épouse de Pierre Charron, nous avons conclus que nous ne pouvions ignorer les résultats des tests génétiques des huit descendants dont nous avons vérifié la généalogie jusqu’à ce jour. Il fallait donc explorer d’autres possibilités quant aux origines de Catherine Pillard, et prendre en considération la possibilité qu’il puisse y avoir en Nouvelle-France, entre 1663 et 1665, une autre femme portant un nom similaire. Tous les chercheurs ont rencontré à maintes reprises ce genre de piège dans leurs recherches, et les généalogistes chevronnés s’affairent toujours à détecter la présence de couples ou d’individus homonymes. Et Dieu sait qu’il y en a au Québec comme ailleurs. De la France à la Nouvelle-France
Un acte de baptême daté du 30 mars 1646 a été trouvé à la chapelle
Sainte-Marguerite de La Rochelle, en Aunis, France,
Bien que non conclusif, selon le Fichier Origine et le PRDH, il s’agit là de l’acte de baptême de Catherine Pillard, future épouse de Pierre Charron.[4]
Une recherche approfondie dans les registres de La
Rochelle pour la période en question donne ample matière à réflexion.
On relève le patronyme Pillard dans quelques actes de baptême à Sainte-Marguerite
de La Rochelle, en France. Ainsi le 25 décembre 1632, a été baptisé Noël
Pillard, fils de Pierre et Marie Palaitte.[5] Un autre
enfant du même couple s’y retrouve, soit le 1er novembre 1636 à Sainte-Marguerite
de La Rochelle, a été baptisée Margueritte, fille de Pierre Pillard et Marie Paillete.[6]
Le second couple Pillard que l’on retrace dans les registres de La
Rochelle est celui de Pierre Pillard et de Marguerite Bouricaud, dont le fils
Pierre est baptisé le 19 avril 1635, à la paroisse Notre-Dame-de-Cougnes de La
Rochelle.
[7]
Un autre fils, Jean, né du couple Pillard/Bouricaud, est baptisé le 10
novembre 1641 à la chapelle Sainte-Marguerite de La Rochelle.[8]
Il y a peut-être d’autres enfants pour le couple Pillard/Bouricaud, mais
à ce jour, ils n’ont pas été retracés
dans les registres de La Rochelle. Il est fort possible que Catherine
Pillard, baptisée le 30 mars 1646, fille de Pierre et de Marguerite (sans nom),
soit une enfant du couple Pillard/Bouricaud. Ce baptême s’ajoute facilement à
la suite des dates de baptême des autres enfants du couple. En fait, si c’était
le cas, cette Catherine, native de La Rochelle en France, ne pourrait pas être
celle qui a épousé Pierre Charron, au Canada, en 1665.
Or, cet acte de mariage nous indique que la mère de Catherine Pilliat est
Marguerite Moulinet.[9]
Une recherche exhaustive dans les registres de
la chapelle Sainte-Marguerite et de la paroisse Notre-Dame-de-Cogne de La
Rochelle en Charente-Maritime, ainsi que ceux des paroisses avoisinantes de Saint-Nicolas
et de Saint-Barthélemy, démontre l’absence du nom de Moulinet dans les actes
contenus dans ces registres.[10]
Toutefois, le patronyme
Moulnier y apparaît à quelques reprises.
À travers les registres de la Nouvelle-France
N’ayant trouvé dans les registres de La Rochelle et des paroisses
avoisinantes, aucune confirmation du baptême d’une Catherine Pillard issue du
couple Pillard/Moulinet, ni même de l’existence de ce couple,
nous avons dès lors concentré notre attention
sur les registres de la Nouvelle-France. Notre recherche ciblait une autre
Catherine pouvant être la future épouse de Pierre Charron, possiblement
d’origine autochtone puisque les résultats des tests d’ADNmt dont il est
question correspondent aux marqueurs génétiques des Autochtones de la
Nouvelle-France.
À partir de 1664, on retrouve à maintes reprises dans les registres et
actes notariés de la Nouvelle-France, mention de Catherine Pillard, aussi
connue sous les noms de Plat, Plate, La Platte, Laplatte, Pillat, Pilliat,
Piliate, Peillate, Peillaste. Jusqu’à ce jour, les historiens s’accordent toutefois
sur la chronologie des évènements retracés dans les registres de la
Nouvelle-France, concernant Catherine Pillard.
Une première mention sous le nom de Catherine Plate est consignée au registre des confirmations de Montréal en date de mai 1664.[11] Les registres étant tenus en double exemplaire, on y remarque quelquefois des erreurs, ajouts ou omissions; c’est d’ailleurs le cas en ce qui concerne le registre des confirmations dont il est ici question. Dans un premier registre, la liste des confirmés de Montréal, dont le quantième de la date a été omis, est située entre celles des confirmés de Trois-Rivières en date du 1er mai 1664 et du 22 mai 1664; on en déduit donc qu’il s’agit d’une liste en date de mai 1664. Sur cette liste de confirmés se trouve dans l’ordre Catherine Plate, Louyse Chartier et Charles François, huron. Dans le second registre, malgré l’ordre chronologique inchangé, la date de cette liste de confirmés est dite du 11 juillet 1664. On trouve aussi le patronyme « Atsanhannonk » ajouté à Charles François, juste au dessus du mot « huron ».
La seconde apparition de Catherine Pillard dans les registres, cette
fois sous le nom de Pilliat, sera à
l’occasion de son mariage avec Pierre Charron, le 19 octobre 1665 à la paroisse
Notre-Dame de Montréal. Il est intéressant de noter qu'au recensement de Montréal en 1667,
Catherine Pillard apparaît à maintes reprises dans les registres de
la Nouvelle-France, de 1664 jusqu’à sa mort en 1717 à Montréal. Toutefois,
comme nous avons pu le constater dans une étude plus approfondie des documents
concernant le couple Charron/Pillard et leurs enfants, le nom
« Pillard » inscrit tel quel, n’y apparait que très rarement. La
liste chronologique à la fin de cet article se résume ainsi :
En y regardant de plus près, on constate que le nom Plat / Plate et sa variante
phonétique Pilat est utilisé le plus fréquemment, soit 45 fois sur un total de
56 actes officiels, tous facilement vérifiables.
Un fait plutôt inusité a retenu notre attention, et conséquemment, a
suscité une autre question : Sébastien Brisson, bien que marié au moins
huit ans et demi avec Catherine Pillard/Pilliat, semble avoir oublié, à
quelques reprises, le nom de famille de sa femme pour ne se rappeler que de
celui de son mari précédent, Charron. Et comme si ce n’était pas suffisant, il
sent le besoin d’y ajouter que celle-ci est
« issue
de La Rochelle »… Mais de quelle La Rochelle ?
Catherine Plat ou Pilliat, originaire de France ou de Nouvelle-France ?
Une recherche systématique des registres de Notre-Dame de Montréal de
1645 à 1655 n’apporte
Au bas de la même page du registre paroissial de Montréal, on note le
baptême en date du 31 décembre 1651, « d’un enfant nommé Saentsannen, fils
d’un Huron décédé et de Etsa8ontông »; son parrain, Charles d’Ailleboust, lui donna
le nom de Charles.
Lors d’un échange parmi un groupe de discussion, le généalogiste
québécois Denis Beauregard nous a fait remarqué que ce Charles, fils
d’Etsa8ontông cité dans l’acte de baptême en question, est fort possiblement le
même que celui qui apparaît avec Catherine Plate dans le registre des confirmations
de mai 1664 à Montréal, où il est dit se nommer Charles François
[Atsanhannonk], Huron. Phonétiquement parlant, la ressemblance est grande, et
il a probablement raison d’assumer qu’il s’agit ici d’une seule et même
personne.
Autre détail fort intéressant, et peut-être pertinent dans cette
enquête : l’officiant dans les deux actes de baptêmes mentionnés ci-haut,
Claude Pijart, Jésuite missionnaire, a servi chez les Algonquins de 1635
jusqu’à 1650 alors qu’on le retrouve à Montréal. En 1657, il est rappelé à
Québec pour servir au sein de la mission huronne de Sillery. Or, Claude est le
frère ainé de Pierre Pijart, Jésuite missionnaire né le 17 mai 1608 à Paris et
fils de Claude Pijart et de Geneviève Charon. S’agit-il ici d’une simple
coïncidence ? Pierre Pijart fût missionnaire en Huronie de 1635 à 1644, alors
que lui et le Père Jérôme Lalemant retournent aux Trois-Rivières accompagnés d’un
groupe de Hurons d’Ossossané. En janvier 1645, Pierre Pijart est nommé
procureur (trésorier) de la mission Huronne jusqu’à son départ pour la France
au mois d’août 1650.[13]
Il n’en fallait pas plus pour que nous décidions d’y regarder à deux
fois. Nos recherches se sont donc concentrées sur les parents de 8enta (Ouenta) dite Catherine,
et tout particulièrement sur son père
prénommé « Du Plat » à l’acte de baptême de celle-ci.
Atseña dit Le Plat, chef de la Nation de l’Ours
Une recherche sur Google nous a permis de faire le lien entre Du Plat et
Atseña surnommé Le Plat, chef Huron aussi décrit comme « Grand chef de guerre »[14], originaire d’Ossosané.
Fort
probablement arrivé à Sillery avec le contingent huron de juillet 1650 ou
celui de l'automne 1651, Atseña se
retrouve à Montréal en novembre 1651 où il fait baptiser sa fille 8enta dite
Catherine. Les Iroquois le repèrent rapidement et le lui firent savoir. Car
quelques mois plus tard, soit le 15 mai 1652 à Montréal, un groupe de 50 à 60
Iroquois font prisonniers trois Hurons que nous croyons être sa femme, une de
ses filles et son petit fils de 4 ans. Afin de ne pas mettre en danger les
Hurons de la Nation de l’Ours qui ont été regroupés dans une
« réserve » de l’Isle d’Orléans, Atseña, leur grand capitaine, se
retire alors chez les Algonquins de Trois-Rivières.
En janvier 1654, les Relations nous apprennent que les Agniers « ont des présents à faire en cachette
aux Hurons de l’Isle et que leur en ayant fait cet automne, Atseña dès ce temps
la leur en avoit rendu trois de leur part aux Trois R. pour leur témoigner
qu’ils agroient la proposition d’aller en Annieñé ».[16] Promesse que les Hurons devront éventuellement respecter
dans l’espoir de voir cesser les attaques iroquoises incessantes sur la petite
colonie française qui n’a pas la population nécessaire pour les combattre avec
succès.
Toujours dans les Relations des Jésuites, nous apprenons qu’en 1655,
après la défaite des Hurons à l’Isle d’Orléans aux mains des Iroquois, ces
derniers intensifient les modes de pression et l’étau se resserre autour des
missions Huronnes de l’Isle d’Orléans, Sillery et Trois-Rivières. Les Iroquois
n’auront de cesse que lorsqu’ils obtiendront gain de cause. Le 12 février 1657,
on apprend qu’un des deux Iroquois restés dans la cabane d’Atseña (Atchenha) est
blessé à la tête d’un tison par un Algonquin ivre venu depuis peu des
Trois-Rivières.[17]
Le 10 mai 1657,
le nom d’Atseña dit Le Plat, Capitaine Huron, refait surface dans les
Relations des Jésuites, lors des négociations qui ont lieu à Québec entre les
trois nations huronnes, soit la Nation de La Corde dont le chef est Étienne
Annaotaha, la Nation du Rocher et la Nation de l’Ours dont le chef est Atseña, et
deux nations Iroquoises, l’Agnieronon et l’Onontagheronon. Ces derniers cherchent par tous les moyens à
convaincre les Hurons de se joindre à leurs nations respectives. Les Pères
Jésuites, le Gouverneur de la Nouvelle-France et/ou ses représentants ainsi que
les Algonquins, alliés des Hurons, sont présents lors de ces négociations.
À la lueur des renseignements fournis par le Journal des Jésuites et par
les Relations des Jésuites, il semble évident qu’Atseña ait été le porte-parole
de la Nation Huronne au cours des nombreuses négociations entre Hurons et
Iroquois entre 1653 et 1657.
Les Hurons étaient tout à fait conscients du sort qui
les attendait, ils n’avaient pas oublié la perfidie et la traitrise de
l’Iroquois, mais les dés étaient jetés, et il leur était impossible de reculer.
Ils se devaient de respecter les promesses faites quatre ans auparavant lors
des pourparlers de paix de la Nouvelle-France avec l’Iroquoisie supérieure qui
débutèrent en septembre 1653, sinon c’en était finie de cette
supposée paix obtenue si chèrement par les Français.
En
tant que représentant de la Nation de l’Ours dont il était le chef et Grand
Capitaine de Guerre, Atseña savait fort bien les conséquences d’un refus au
point où en étaient les choses. Mais n’ayant plus l’appui des Français qui
recherchait la paix à tout prix pour leur petite colonie, c’était maintenant au
tour de l’Huron de se sacrifier au nom de cette « paix »…
Après maintes consultations, il fut résolu que
la Nation de la Corde resterait à Québec, que la Nation du Rocher partirait pour
Onontagé, tandis que la Nation de l’Ours se mettrait entre les mains de
l’Agnieronon.[18]
Cette
décision allait définir l’avenir de ces trois Nations. Après le départ d’Atseña
dit Le Plat pour le pays de l’Agnier au mois d’août 1657, on n’en retrouve aucune
mention dans le Journal des Jésuite et les Relations des Jésuites, ou autres
documents de l’époque.
Cependant, le Père Boquet nous apprend à son retour d’Onontagé le 6
octobre 1657, « le meurtre fait le 3e
jour d’aoust 1657, à quatre journées au dessus de Montréal par les
Onontageronons, contre les Hurons du Québec qui montaient avec le Père
Ragueneau à Onontagé. »[19]
Pour sa part, le Père Simon Le Moyne confirme le massacre de tous les Hurons du
dernier groupe qui se rendaient à Onontagé.[20]
Le 3 janvier 1658, Québec reçoit des nouvelles du groupe d’Atseña de la
Nation de l’Ours lorsque trois Agnierons de passage remettent aux Jésuites des
lettres du Père Simon Le Moyne en provenance d’Onontagé. Dans l’une d’elles, il
dit qu’il : « déplore la calamité
des pauvres Hurons qui s’estant confiez à ces perfides, les ont suivis dans
leur païs, où ils sont traitez comme des esclaves. Le mary est séparé de sa
femme, les enfans de leurs père et meres; en un mot, ils servent de bettes de
charge à ces Barbares. C’est un advis aux Hurons qui restent et qui demeurent
encore parmy les François, pour ne pas se fier aisément aux Iroquois, s’ils ne
veulent perdre le corps et l’ame. »[21]
La Rochelle en Nouvelle-France
En 1615, l’ancienne Huronie, située dans la région de la Baie
Georgienne, occupait un vaste territoire montagneux d’environ 800 miles carrés
délimité par la Baie de Matchedash, la Baie de Nottawasaga et le lac Simcoe.
Cette région était connue des indigènes sous le nom de Wendake et son peuple
les Wendats. Ce sont les Français qui à leur arrivée, leur donnèrent le surnom
de Hurons, basé sur l’apparence de leur chevelure dressée sur leur tête en
forme de hure.
Localisation des villages Hurons et des missions des Jésuites 1615 - 1650
Tiré de: Huronia – A History and Geography of the Huron Indians 1600-1650 par Conrad
Heidenreich –
Ministère des richesses
naturelles de l’Ontario, Division des sites historique
Selon le Récollet Sagard, « Tequeunoikuaye » aussi connu sous
le nom de La Rochelle par les
Français et de St-Gabriel par les Récollets, était le chef lieu de la région,
et gardien de toutes les bourgades de la Nation de l’Ours. Connu plus tard sous
le nom d’Ossosané, la mission fondée par les Jésuites porta le nom d’Immaculée
Conception.[22]
Les
conflits entre les Hurons et les Iroquois existaient depuis fort longtemps. Les
défaites des Agniers en 1609 et 1610 aux mains des Hurons et des Algonquins,
leurs alliés, aidés par Champlain et ses hommes, ont contribué grandement à
envenimer les conflits existants. Ce fut le déclenchement d’une longue série
d’attaques impitoyables qui s’intensifieront après 1635, lorsque les Iroquois
cherchèrent à s’approprier le monopole de la traite des fourrures. Les guerres incessantes
et les nombreuses épidémies eurent éventuellement
raison des effectifs des Hurons. Au début de
1650, avec l’aide des Jésuites et des Français, moins d’un millier de Hurons
trouveront refuge à Montréal, Québec, Sillery et Trois-Rivières. Ils sont
principalement des Nations de l’Ours, de la Corde et du Rocher, comme on
l’apprend à la lecture des Relations des Jésuites.
Atseña
n’avait d’autre choix que de se sacrifier de même que les membres des Nations
de l’Ours et du Rocher. Ce sacrifice avait aussi pour but de permettre la survie
d’au moins une des trois Nations Huronnes s’étant réfugiées à Sillery, soit la celle
de la Corde. Ces derniers, de même que les quelques Hurons de la Nation de
l’Ours et de la Nation du Rocher qui avaient été assimilés par les Français et
les Algonquins, sont évidemment les ancêtres de la majorité des Hurons de
Wendake, à St-Ambroise de la Jeune-Lorette, près de Québec.
Le Journal des Jésuites ainsi que les Relations des Jésuites de 1657 fourmillent d’information sur le déroulement des évènements qui détermineront l’avenir de la nation Huronne. Il est impossible de faire ici un résumé adéquat des évènements qui se sont déroulés en Huronie et qui obligèrent les Hurons à trouver refuge auprès des Français et des Algonquins. Nous conseillons aux lecteurs de consulter les multiples publications disponibles sur le sujet.[23]
Épilogue
Comme il n’y a qu’un seul Huron dans les registres de la
Nouvelle-France, ainsi que dans les Relations des Jésuites, portant le dit nom
de Plat, Du Plat ou Le Plat, il n’y a pas de doute qu’Atseña dit Le Plat, chef
de la Nation de l’Ours dont il est question dans les Relations des Jésuites,
soit en fait le même individu apparaissant aux registres de la paroisse
Notre-Dame de Montréal, sous le nom de
Du Plat, père de 8enta dite Catherine baptisée le 25 novembre 1651. Si on
suppose que cette Catherine est celle qui épouse Pierre Charron en 1665, cela pourrait
expliquer l’opposition faite suite à la publication du premier ban, en raison
de l’âge de la future mariée, qui aurait été âgée d’environ quatorze ans à
cette période. De plus, cela expliquerait l’usage du nom Plat et de ses
multiples variantes comme nom de famille de Catherine, tel qu’il apparait dans
les différents registres paroissiaux et dans les actes notariés.
Pour résumer, le cercle de vie de Catherine débute en juin 1651 en
tant que 8enta fille d’Atseña dit Le Plat
alors qu’en novembre suivant, on la baptise du nom de Catherine, fille de Du
Plat ; en 1665 à Montréal, elle épouse
Pierre Charron; et sa vie prend fin en 1717 sous le nom de Catherine Plat, veuve de Pierre Charron.
(Drouin
numérisé – Notre-Dame de Montréal - Acte de sépulture de Catherine Plat, le 24
juillet 1717)
Il y a parfois dans la vie de drôles de coïncidences, si coïncidence il
y a…. À vous d’en juger.
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[1] Catherine Pillard, Fille du roi, Algonquienne d’ascendance
sibérienne, née en France vers 1651… Où est l’erreur? Le Chaînon,
Volume 25, numéro 3, Automne 2007, pages 25 à 35; Volume 26, numéro 1 et Volume
26, numéro 2.
[2] René Jetté, Dictionnaire
généalogique des familles du Québec des origines à 1730, Les Presses de
l’Université de Montréal, Montréal 1983, page 233; Silvio Dumas, Les
Filles du roi en Nouvelle-France : Étude historique avec répertoire
biographique, La Société historique du Québec, Québec 1972, page 313; Joy
Reisinger, Elmer Courteau, The King’s Daughters, Revised
Edition, Joy Reisinger: Sparta, Wisconsin, 1988, page 165; Peter J. Gagné, King’s
Daughters and Founding Mothers: The Filles du Roi, 1663-1673, Volume 2,
Quintin Publications: Pawtucket, Rhode Island, page 458; Yves Landry, Orphelines
en France pionnières au Canada: les filles du roi au XVIIe
siècle, suivi d’un Répertoire biographique des Filles du roi, Leméac:
Montréal, 1992, page 357; site web :
https://www.fillesduroi.org/Daughters/Filles/filles.html
[3] Aussi trouvé sur FHL microfilm #1896307, items 1-5. Ce
microfilm comprend les paroisses de Sainte-Marguerite et de
Notre-Dame-de-Cogne.
[4] Fichier Origine #243300 en date du 17 août 2008.
[5] FHL microfilm
#1896307.
[6] Ibid.
[7] Ibid.
[8] Ibid.
[9] Archange Godbout, o. f. m., Émigration rochelaise en
Nouvelle-France (Archives nationales du Québec, 1970), pages 190 et
191. Selon Godbout, Marie Catherine Pillard est née en 1651, fille de Pierre
(Pillard) et Marguerite Moulinet, de
Notre-Dame-de-Cogne. Il fait aussi mention de deux individus portant le nom de Pierre
Pillard à cette époque à La Rochelle: (1) Pierre marié à Marie Palette /
Paillette; (2) Pierre marié à Marguerite
Bouricaud.
[10] Les Archives
Départementales de la Charente-Maritime sont maintenant disponibles sur
Internet gratuitement au : https://www.charente-maritime.org/conseil_general_17/archives_departementales/accueil_archives.htm.
[11] Family
History Library (FHL) microfilm #0375840 (Notre-Dame de Montréal); FHL #1311432,
item 14; PRDH #403601 (Mai 1664), #403605 (11 juillet 1664).
[12] PRDH
#39463; FHL microfilm #0375840.
Le PRDH
reconnaît depuis le 19 avril 2008 que le nom du père de Catherine est
Du Plat.
[13] Dictionnaire
Biographique du Canada - Volume I.
[14] Relations des
Jésuites - Volume III, (Québec:
Augustin Côté, Éditeur-Imprimeur près de l’Archevêché, 1858), Table
alphabétique page 5.
[15] Relations des Jésuites, Volume 37, page 106
[16] Relations des Jésuites, Volume 41, page 18
[17] Relations des Jésuites, Volume 43, pages 27 et 28
[18] Relations des Jésuites, Volume 43, page 192
[19] Relations des Jésuites, Volume 43, page 58
[20] Relations des Jésuites, Volume 44, page 216
[21] Relations des Jésuites, Volume. 44, pages 202 à 204
[22] Les Relations des Jésuites, Volume V, page 292 (version anglaise seulement) [23] En particulier : La Société Huronne par Lucien Campeau, S.J. – S.C.H.E.C. Sessions d’étude, 50, 1983, Université du Manitoba; A Chapter in the History of Huronia - at Ossossané in 1637 by Angela A. Hannan. M.A.; Les Saints Martyrs Canadiens par Guy Laflèche, Édition du Singulier; Les Relations Abrégées par P.F.J. Brussani, 1653; The Jesuits Relations and Allied Documents : Travels and Explorations of the Jesuit Missionaries in New France 1610-1791, Edited by Reuben Gold Thwaites
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Note des auteures: Suite à la parution du premier article en septembre 2007, au sujet des origines de Catherine Pillard, Colleen Fitzpatrick, auteure de "Forensic Genealogy" et co-auteure de "DNA & Genealogy", avait fait parvenir le commentaire suivant qui fut publié dans Le Chaînon Vol. 26 No 1: « Je viens de lire l'article sur Catherine Pillard et ses résultats d'haplogroupe A. J'aimerais préciser qu'il existait deux Catherine Pillard. La première est née en France et la seconde était une amérindienne qui a changé son nom. Je ne vois aucune raison de questionner les registres baptismaux disponibles pour Catherine Pillard de France, ni de douter du fait qu'elle soit venue au Nouveau Monde. Le questionnement semble débuter entre l'arrivée de Catherine Pillard de France et le mariage d'une certaine Catherine Pillard à Pierre Charron. Existe-t-il une preuve qui confirme que les deux Catherine Pillard aient été la même personne ? » Le présent article démontre que les suggestions de Mme Fitzpatrick étaient tout à fait justifiées. Grâce aux registres de la Nouvelle-France, nous croyons avoir fait la preuve que Catherine Plat a.k.a. Pillard, Pillat. etc..., épouse de Pierre Charron, n'est pas la même personne que Catherine Pillard née en France en 1646. |
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